Étudier les flux d’azote chez la vache laitière

L’élevage des ruminants est souvent décrié pour ses impacts environnementaux, en particulier ses émissions d’ammoniac vers l’air liées à la dégradation de l’urée excrétée dans l’urine (European Environment Agency, 2019) et son utilisation de ressources consommables par les humains. Pour relever ces défis, les éleveurs peuvent inclure plus de fourrages dans l'alimentation des vaches laitières. L'herbe est un aliment peu coûteux, produit à la ferme et de bonne valeur nutritive (INRA, 2018). Cependant, sa disponibilité et sa composition varient tout au long de l'année. Ainsi, les éleveurs complètent fréquemment l'herbe avec d'autres aliments, comme de l’ensilage de maïs. Il est conseillé de ne pas compléter les régimes à base d'herbe avec des concentrés riches en azote lorsque l'ensilage de maïs représente moins de 50 % de la matière sèche (MS) du régime (IDELE, 2010). Or, les effets de cette combinaison de fourrages, sans concentrés, sur les flux (entrées et sorties) d’azote à l’échelle de l’animal ne sont pas bien connus. Notre étude visait donc à quantifier les effets de différentes proportions d'ensilage de maïs (0, 17, 34 et 51% de la MS offerte) dans un régime à base d'herbe sur les flux d'azote des vaches laitières.

Une capacité d’adaptation mais des difficultés pour l’animal

Du fait de la faible teneur en azote de l’herbe, l'augmentation de la proportion d'ensilage de maïs de 0 à 51 % dans la ration des vaches laitières a conduit à de très faibles teneurs en matières azotées totales des rations (106 à 86 g/kg MS, respectivement), entraînant une diminution d’environ 3 kg/jour de l’ingestion de MS et de la production laitière respectivement. Dans ces situations de déficit extrême en azote pour des vaches en lactation, la majeure partie de l'azote ingéré a été utilisée, et l'azote excrété dans les fèces et l'urine réduit à son minimum, en particulier pour la ration composée pour moitiés d'herbe et d'ensilage de maïs. Ces régimes ont conduit à une excrétion d'azote uréique urinaire extrêmement faible (4,4 g/jour, soit 8 % seulement de l'azote urinaire). Cette étude illustre clairement l’existence d’un compromis entre limitation des pertes d'azote et maintien relatif des performances animales. En effet, si les vaches ont montré une grande capacité à s'adapter à un déficit sévère en azote en optimisant l’utilisation de cette ressource (fort recyclage, pertes minimales), elles ont eu des difficultés à maintenir des niveaux d’ingestion et de production laitière suffisamment élevés, avec des conséquences défavorables pour l’animal (fonctionnement ruminal, santé, bien-être) et pour l’éleveur (revenu).

Améliorer les équations de prévision dans les systèmes d’alimentation

Ces résultats serviront à améliorer les équations de prévision de l’ingestion et de l’excrétion d’azote des vaches laitières alimentées avec des rations à très faible teneur en azote, pour lesquelles les systèmes d’alimentation INRA 2018 sont peu performants à ce jour (Ferreira, 2023).

Références bibliographiques

• European Environment Agency (EEA), 2019. EMEP/EEA air pollutant emission inventory guidebook 2019. Technical guidance to prepare national emission inventories. EEA, Copenhagen, Denmark. [lien]
• Ferreira M., 2023. Efficience et excrétion d’azote de vaches laitières alimentées avec des régimes associant herbe verte et ensilage de maïs. Thèse de doctorat, l’Institut Agro Rennes-Angers.
• Ferreira M., Delagarde R. et Edouard N., 2023. Nitrogen balance in dairy cows fed low-nitrogen diets based on various proportions of fresh grass and maize silage. Animal 17, 100976. [DOI]
• IDELE, 2010. Guide pratique de l’alimentation du troupeau bovin laitier. Editions Quae, Versaille, France.
• INRA, 2018. INRA feeding system for ruminants. Wageningen Academic Publishers, Wageningen, Netherlands.