La farine de pois comme alternative à la farine de soja en alimentation porcine

La déstructuration des fibres de pois de la ration augmente la digestibilité des protéines en alimentation porcine.

Modifier la structure du pois pour optimiser sa digestibilité

L’utilisation d’alternatives au soja, issu majoritairement d’importation (en France, 190 000 tonnes de soja destiné au porc), comme source durable de protéines en alimentation animale fait l’objet d’une attention croissante (Wilkinson et Young, 2020 ; Djuragic et al., 2021). Dans ce contexte, les légumineuses, comme le pois, sont connues pour être une alternative à la farine de soja dans l’alimentation des porcs par leur teneur intéressante en protéines (White et al., 2015). Cependant, le pois et ses co-produits contiennent des fibres alimentaires qui peuvent avoir un impact négatif sur la digestibilité des nutriments par le porc et ainsi sur la valeur énergétique de l'aliment (Buraczewska, 2001 ; Noblet et Le Goff, 2001). En modifiant la structure du pois, en particulier les parois cellulaires, il serait possible d’optimiser sa digestibilité et ainsi promouvoir des effets bénéfiques sur la santé digestive, la croissance, et le bien-être général du porc.
Pour tester cette hypothèse, la farine de pois a été utilisée sous deux formes différentes : « ordinaire » (R1, protéines encapsulées par des parois cellulaires pour la plupart intactes ; particules de taille moyenne de 0,5 mm) et reconstituée (R2, protéines purifiées et parois cellulaires brisées). La libération des protéines à partir de ces deux farines et leur hydrolyse par des protéases ont été étudiées via des méthodes in vitro et in vivo chez le porc.

La digestibilité des protéines dépend de l’intégrité des parois cellulaires du pois

In vitro, le pourcentage de protéines de R1 solubilisées dans les fluides digestifs reconstitués a augmenté entre la phase gastrique et la phase intestinale. Bien que totalement bioaccessibles, les protéines de R2 n'étaient pas solubles ; une proportion importante d'entre elles a donc précipité, notamment dans le compartiment gastrique, certainement en raison du pH acide. Cependant, leur taux d’hydrolyse était supérieur à celui des protéines de R1 au niveau gastrique et intestinal : à l'issue de la digestion in vitro, 13 % des protéines restaient non hydrolysées pour R2 (30 % pour R1). Les résultats obtenus in vivo sont en accord avec ces valeurs avec une réduction de la digestion des protéines d’environ 19% pour R1 comparé à R2.

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Digestibilité des protéines chez le porc nourri avec différentes formes de farine de pois. Source : Grundy et al. 2023, J. Anim. Sci., 101, skad037. © M. Grundy

Nous avons donc démontré que les données in vivo et in vitro concordaient et que la digestibilité des protéines dépendait de l’intégrité des parois cellulaires du pois et donc de l’accessibilité des protéines intracellulaires. Nos résultats fournissent également des preuves convaincantes qu’un mécanisme d’encapsulation ralentit la digestion des protéines du pois.

De nouvelles études pour déterminer la taille des particules, la solubilité des fibres du pois et leurs interactions avec la muqueuse

La transformation (broyage) des ingrédients d’origine végétale peut déstructurer la paroi cellulaire (les fibres), modifiant leurs propriétés physico-chimiques. Il reste maintenant à déterminer à partir de quelle taille de particules la digestion des protéines est la moins limitée. Étudier la solubilisation des fibres du pois et leur interaction avec la muqueuse et les cellules intestinales serait également pertinent. En effet, les fibres peuvent influencer la morphologie de l’intestin et le passage de nutriments et autres molécules depuis le tube digestif, et ainsi la santé de l’animal.

Références bibliographiques

  • Buraczewska, L. 2001. Fibre components negatively affect ileal protein digestibility in pigs. J. Anim. Feed Sci. 10: 139-152.
  • Djuragic, O., S. Rakita, and D. Dragojlovic. 2021. The possibilities of alternative protein use in animal nutrition. IOP Conf. Ser.: Earth Environ. Sci. 854: 012026.
  • Grundy M.M.-L., Labarre J., Mayeur-Nickel F., van Milgen J., Renaudeau D., 2023. An in vitro and in vivo approach to characterise digesta from pigs fed different forms of pea flour. J. Anim. Sci., 101, skad037. [DOI]
  • Noblet, J., and G. Le Goff. 2001. Effect of dietary fibre on the energy value of feeds for pigs. Anim. Feed Sci. Tech. 90: 35-52.
  • White, G. A. Smith, L. A., Houdijk, J. G. M., Homer, D., Kyriazakis, I., and Wiseman, J. 2015. Replacement of soya bean meal with peas and faba beans in growing/finishing pig diets: Effect on performance, carcass composition and nutrient excretion. Anim. Feed Sci. Tech. 209: 202-210.
  • Wilkinson, J. M., and R. H. Young. 2020. Strategies to reduce reliance on soya bean meal and palm kernel meal in livestock nutrition. J. Appl. Anim. Nutr. 8: 75-82.